Inspiré du vécu d’Alexandra LANGE, retracé pour TF1 dans le téléfilm ‘’L’emprise’’ .
Tu es belle comme un ange et tu portes son nom. Croyez-moi, cette phrase en dit long. C’est avec ces quelques mots que David m’a draguée. Un soir de juillet, c’est ainsi qu’entre nous tout a commencé. Nous avions tout pour être heureux. Nous élevions quatre merveilleux enfants dans une grande et belle maison : qui dit mieux ?
Malgré cela, j’ai très souvent rêvé de le voir crever. Vous vous demandez sans doute pourquoi tant de haine, ce que je vais bien évidemment vous expliquer. Sur mes longs cheveux noirs bouclés, ce grand séducteur a flashé. Hélas, il ne s’est pas contenté de m’aimer. Il m’a manipulée.
Avec lui, je n’avais plus de vie sociale, plus aucune vie privée. Jour et nuit, j’étais à ses pieds, comme ensorcelée. Il ordonnait et je m’exécutais. Je ne bronchais jamais : au fond, c’était pour lui que mon cœur battait. Nous nous sommes peu à peu isolés. Je me suis éloignée de mes amis proches, j’ai coupé les ponts avec ma famille qu’il m’a poussée à renier.
Du soir au matin, j’étais critiquée, rabaissée. Il aimait me voir angoisser, me culpabiliser. Devant les petits, il prenait un malin plaisir à m’humilier. Son passe- temps principal consistait à me fliquer. Il saisissait la moindre occasion de me déstabiliser. Avant lui, jamais personne ne m’avait si mal parlé.
Il était affreusement jaloux, me réduisait à de la merde, me prenait pour sa bonniche, me traitait de pute ou de traînée. A plusieurs reprises, j’ai tenté de lui parler. C’est un profond mal être que j’ai voulu exprimer. Il ne m’a jamais écoutée ni entendue, n’a jamais changé.
Un beau jour, il s’est mis à boire, n’a plus jamais arrêté . Notre aînée avait six ans lorsqu’il a commencé à me frapper. Je ne voulais pas croire à la réalité d’un tel geste que tout était prétexte à excuser. Pour justifier les fréquentes traces de coups, je prétextais m’être cognée, avoir glissé sous la douche ou trébuché dans les escaliers.
Chaque jour que Dieu faisait, il me maltraitait. Vous n’imaginez pas les souffrances que j’endurais. Deux ou trois fois dans une même journée, d’une main de fer, il me giflait. Dans notre chambre, parfois, il me patinait. Il me tirait par les cheveux et contre le mur blanc de la salle de bain, ma tête se fracassait. Percluse de douleur, je pleurais, je hurlais.
C’est toutes les larmes de mon corps que je versais. Il m’a couverte de bleus, m’a cassé le tibia ou le péroné, peut être les deux. De temps à autres, pris de remords, il s’agenouillait et m’embrassait. Il m’offrait des tas de cadeaux qui malgré moi me ravissaient. Avec tous ces paquets, il espérait que je lui pardonnerais. Bien entendu, je ne l’ai jamais fait.
Toute cette violence, j’aurais pu vous l’épargner. A mon tour, sans le vouloir, je vous ai peut-être choqués. Si tel est le cas, j’en suis désolée. Je voulais simplement que vous sachiez. J’avais besoin de raconter, de partager. Chers lecteurs, j’espère que vous comprendrez.
A bout de forces, j’ai souvent cru pouvoir m’échapper. Je n’y suis jamais vraiment arrivée. Un soir, pour m’octroyer quelques heures de répit, j’ai osé dissoudre des somnifères dans son verre de vin, je l’ai drogué. Quelques jours plus tard, après avoir tenté de mettre fin à ses jours par pendaison, il a été interné. J’ai signé l’autorisation en espérant le revoir assagi, calmé. Ce fut tout le contraire : le soir de son évasion, il est rentré furieux et en état d’ébriété.
Suite à ses malheureuses retrouvailles, nous avons longuement discuté. Il a prétexté souffrir d’un cancer incurable pour être certain de me garder à ses côtés. J’ai tout naturellement paniqué. Je l’ai cru, me suis laissée embobiner. Cet énorme mensonge, je n’ai jamais pu le digérer.
Le 18 juin 2009, ma vie a basculé. David est mort mais son décès ne m’a en aucun cas libérée. Ce soir-là, dans notre cuisine, une énième dispute a dégénéré. Il a voulu porter le coup de grâce, j’ai saisi un couteau pour l’esquiver. Une seule fois, pour me défendre, j’ai frappé. J’ai visé sa gorge sans vraiment le réaliser. Moi, Gabrielle Latour, je l’ai tué…